79ème Anniversaire de la Libération d’Auschwitz

Journée Internationale en Mémoire des Victimes de la Shoah et de Prévention des Crimes contre l’Humanité

Samedi 27 Janvier 2024 à 10 heures 30

à l’ancienne Gare de la Déportation  de Bobigny, 151 avenue Henri Barbusse, 93000 Bobigny

Caroline Pozmentier-Sportich et Bernard Grinfeld  Coprésident(e) de l'AFMA vous prient d'honorer de votre présence  la cérémonie commémorative sur le site de l’ancienne Gare de la Déportation  de Bobigny, 151 avenue Henri Barbusse  93000 Bobigny

Discours prononcé par Bernard Grinfeld lors de la commémoration:

Cette cérémonie du 27 janvier, date anniversaire de la «Libération» ou plutôt de l’ouverture du camp d’Auschwitz est une tradition à Bobigny.

Elle a été volontairement initiée par Bernard Birsinger alors maire de Bobigny, à l’aube du nouveau millénaire et s’est poursuivie sans interruption depuis lors. Vous -mêmes, monsieur le maire, vous avez participé avec constance, avant même d’être élu maire, à ces moments de commémoration, en janvier, en avril pour la journée des victimes et des héros de la Déportation ainsi qu’en mai avec nos amis du convoi 73.

Au fil des années, les ministres de l’éducation nationale du Conseil de l’Europe puis l’Organisation des Nations Unies ont choisi cette même date du 27 janvier pour se souvenir de toutes celles et de tous ceux qui ont disparus dans la tourmente et rappeler que, ce que nous appelons en France la Shoah, « demeurera à jamais, pour tous les peuples un rappel des dangers de la haine, de l’intolérance, du racisme et des préjugés.

C’est pourquoi nous rendons hommage aujourd’hui aux six millions de juifs qui furent assassinés ainsi qu’à toutes les victimes dont des centaines de milliers de Roms, des homosexuels et des handicapés.

L’an dernier nous avons mis l’accent sur la multiplication des actions de résistance , de la révolte du ghetto de Varsovie et des camps d’extermination de Treblinka, et Sobibor.

Cette année sera marquée par le 80eme anniversaire de la Libération de la France , mais aussi, alors que la défaite des nazis était inéluctable, par l’acharnement d’Alois Brunner à poursuivre les déportations allant jusqu’à débusquer les enfants dans les maisons de l’UGIF pour remplir ses convois.

Ce matin, permettez-moi d’évoquer plus précisément la mémoire de trois personnes survivantes après la guerre mais aujourd’hui disparues.

  • La première, Isabelle Choko a été jusqu’à la fin présidente de l’AFMA. Polonaise, elle a connu dès l’âge de 11 ans l’enfermement dans le Ghetto de Lodz, puis, successivement, les camps d’Auschwitz et de Bergen Belsen. Tout au long de ce parcours elle n’a pu tenir que grâce à la force et l’amour de sa mère ainsi qu’à la solidarité de ses camarades de captivité. A la Libération , elle pesait moins de 30 kgs. Après plusieurs moi de convalescence passés en Suède elle se réfugie à Paris chez un cousin et commence enfin à construire sa vie d’adulte. À l’AFMA , elle était très impliquée, ici à la gare de Bobigny. Elle avait succédé à Jacques Celiset au comité de pilotage et avait signé, avec Lucien Tinader la convention de financement des stèles commémoratives par l’AFMA. Son état de santé ne lui a pas permis de participer à l’inauguration du 18 juillet. Elle est décédée quelques jours plus tard.
  • Claude Bloch s’est éteint dans la nuit du 31 décembre dernier. Au début de la guerre, il vivait à Lyon avec sa mère et son grand-père. La famille ne s’est pas fait recenser comme juive et vivait avec des papiers falsifiés par le grand-père. En février 1944 elle déménage à Crepieux-la-Pape, aujourd’hui commune de Rillieux-la-Pape. Et en avril, au moment où se noue le drame des enfants d’Izieu, la milice confisque l’appartement lyonnais. La résistance exécute Philippe Henriot le 28 juin. Dès le lendemain à l’aube, la milice de Paul Touvier fusille 7 otages Juifs à Rilleux-la-Pape et vient arrêter la famille Bloch à 11h45. Livrés à la gestapo. Le grand-père est assassiné tandis que Claude et sa mère sont conduits au fort Montluc puis à Drancy et déportés de Bobigny à Auschwitz par le convoi, le 77. Claude fut sélectionné pour le travail forcé tandis que sa mère, Aliette Meyer fut gazée. Transféré au camp de Stutthof près de Dantzig, il revint à Lyon après la guerre, devint comptable et fonda une famille qui compte aujourd’hui 17 descendants. C’était un homme humble et discret. Pendant des années , il venait régulièrement à Drancy pour témoigner auprès des jeunes. Les Tinader qui organisaient ces rencontres pouvaient compter sur lui ainsi que sur André Berkover, le père de Thierry et bien d’autres. Il a plusieurs fois participé à nos voyages de mémoire. Il avait l’habitude de dire que «sa mère lui avait donné trois fois la vie, la première fois en le mettant au monde, la deuxième en lui faisant mettre un pantalon au lieu d’un short de scout , au moment de l’arrestation et la troisième fois en lui faisant prendre la bonne file à Auschwitz.»
  • Le troisième est Raphael Feigelson. Élève au lycée Lavoisier à Paris , il participe à 14 ans à la manifestation du 11 novembre 1940 sur les Champs Élysées et s’engage avec son père dans la résistance. Au printemps 1942 il quitte Paris pour Lyon puis Toulouse. Arrêté en 1944 il sera transféré à Drancy et déporté, lui aussi par le convoi 77. Lorsque les nazis évacuèrent le camp d’Auschwitz le 18 janvier 1945, pour entraîner 70 000 détenus dans les « marches de la mort », il se cacha, parvint à s’évader et à aller au devant de l’Armée rouge. Il fut pris pour un espion et dut s’expliquer avec le commandant Shapiro dans la seule langue qu’ils avaient en commun, le Yiddish. Ayant gagné leur confiance, il les conduisit jusqu’au camp le 27 janvier 1945 et poursuivit la lutte avec ses libérateurs.

Les grands témoins qui portaient la mémoire de la guerre disparaissent progressivement si bien que nous devenons, tous, les dépositaires de cette mémoire. Après 30 ans de persévérance, nous avons su inaugurer magnifiquement ce nouveau Mémorial. Sachons nous rassembler pour le faire vivre. Nous pouvons compter sur l’appui de la communauté éducative, la participation de nos associations, la bienveillance des autorités mais aussi sur l’association des amis du Mémorial qui est en formation.

L’aide précieuse de deux jeunes femmes, dynamiques et sensibles: Adèle Purlich ici et Eleonore Ward au Mémorial de la Shoah à Drancy nous sera très utile. Je suis sûr que nous pourrons ainsi aider nos enfants et petits enfants à grandir dans la Paix, la sérénité et le respect de l’autre et des valeurs et principes de notre République.